La cause en bref

R. c. Grand Sudbury (Ville)

La Cour suprême rejette l’appel de la Ville du Grand Sudbury dans une affaire de santé et sécurité au travail.

L’affaire en question découle d’un accident mortel et concerne l’interprétation appropriée de la Loi sur la santé et la sécurité au travail de l’Ontario (la Loi). En septembre 2015, une piétonne a perdu la vie à Sudbury, en Ontario, lorsqu’elle a été happée par une niveleuse qu’un employé d’Interpaving Limited conduisait en marche arrière à travers une intersection. La Ville du Grand Sudbury avait conclu un contrat avec Interpaving afin que celle-ci agisse en tant que constructeur pour la réparation d’une conduite d’eau principale au centre-ville. Contrairement aux dispositions d’un règlement provincial applicable aux chantiers de construction (Règlement), aucune clôture n’avait été installée entre l’endroit des travaux et l’intersection publique, et aucun signaleur n’aidait le travailleur d’Interpaving. Dans une instance distincte, Interpaving a été reconnue coupable d’avoir manqué au devoir qui lui incombait en tant qu’employeur aux termes de l’alinéa 25(1)c) de la Loi de « veille[r] à ce que [. . .] les mesures et les méthodes prescrites [par le Règlement] soient observées dans le lieu de travail ».

La question que soulevait l’appel était de savoir si la Ville était responsable d’avoir manqué à ce même devoir à titre d’employeur. Le ministère du Procureur général de l’Ontario (ministère du Travail, de l’Immigration, de la Formation et du Développement des compétences) a poursuivi la Ville sur la base de l’alinéa 25(1)c). Le terme « employeur » est défini au paragraphe 1(1) de la Loi comme étant toute personne qui emploie un ou plusieurs travailleurs ou qui loue les services d’un ou de plusieurs travailleurs. La Ville a reconnu qu’elle était propriétaire du chantier de construction, mais elle a nié avoir été un employeur, pour le motif qu’elle n’exerçait pas de contrôle sur les travaux de réparation et qu’elle avait délégué ce contrôle à Interpaving.

La juge de première instance a acquitté la Ville. À son avis, Interpaving, et non la Ville, avait le contrôle direct des travailleurs et de l’intersection, ce qui signifiait que la Ville n’était pas un employeur visé par la définition figurant au paragraphe 1(1) de la Loi. Subsidiairement, même si la Ville avait manqué à ses obligations à titre d’employeur, la juge acceptait le moyen de défense plaidé par la Ville, soit qu’elle avait pris toutes les précautions raisonnables dans les circonstances, ce qu’on appelle la défense de diligence raisonnable. La Couronne a interjeté appel à la cour d’appel des infractions provinciales, qui a confirmé l’acquittement de la Ville, mais ne s’est pas penchée sur la conclusion de la juge de première instance concernant la défense de diligence raisonnable invoquée par la Ville.

La Cour d’appel de l’Ontario a unanimement accueilli l’appel et annulé la décision du juge de la cour d’appel des infractions provinciales. Elle a appliqué la définition d’« employeur » établie dans une décision antérieure de la Cour d’appel de l’Ontario – qui rejetait l’exigence de contrôle – pour conclure que la Ville était responsable en application de l’alinéa 25(1)c) de la Loi, puis elle a renvoyé à la cour d’appel des infractions provinciales pour décision la question relative à la défense de diligence raisonnable invoquée par la Ville. La Ville a interjeté appel à la Cour suprême du Canada.

La Cour suprême du Canada a rejeté l’appel.

La Ville était responsable en tant qu’employeur d’avoir manqué aux obligations qui lui incombait aux termes de l’alinéa 25(1)c) de la Loi.

La juge Martin a statué que la Ville était l’employeur d’Interpaving et que celle-ci avait manqué au devoir qui lui incombait aux termes de l’alinéa. 25(1)c) de la Loi. Elle a conclu que rien dans le texte, le contexte ou l’objet de la Loi n’exige de la Couronne qu’elle fasse la preuve du contrôle des travailleurs ou du lieu de travail pour démontrer que la Ville a manqué aux obligations qui lui incombent à titre d’employeur aux termes de l’alinéa 25(1)c). Comme l’a affirmé la juge Martin, « réduire les devoirs de l’employeur en ajoutant par interprétation large une exigence de contrôle [. . .] contrecarrerait l’objet de cette loi réparatrice relative au bien‑être public ».

Cependant, la juge Martin a déclaré qu’il convient de tenir compte du contrôle au moment de décider si un employeur qui a manqué aux obligations que lui impose la Loi peut malgré tout se défendre en plaidant qu’il a agi avec diligence raisonnable. Il est loisible à l’accusé – la Ville dans ce cas‑ci – de démontrer que son manque de contrôle indique qu’il a pris toutes les mesures raisonnables dans les circonstances. Pour ces raisons, la juge Martin a rejeté l’appel et confirmé l’ordonnance de la Cour d’appel renvoyant à la cour d’appel des infractions provinciales, pour décision, la question de la défense de diligence raisonnable invoquée par la Ville.

La cause en bref est un document rédigé par le personnel des communications de la Cour suprême du Canada afin d’aider le public à mieux comprendre les décisions de la Cour. La cause en bref ne fait pas partie des motifs de jugement de la Cour et ne doit pas être utilisée lors de procédures judiciaires.