La cause en bref
Québec (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse) c. Directrice de la protection de la jeunesse du CISSS A
- La décision
- Date : le 20 décembre 2024
- Référence neutre : 2024 CSC 43
- Décompte de la décision :
- Unanimité : le juge en chef Wagner a accueilli l’appel en partie (avec l’accord des juges Karakatsanis, Côté, Rowe, Martin, Kasirer, Jamal, O’Bonsawin et Moreau)
- En appel de la Cour d’appel du Québec
- Renseignements sur le dossier (40602)
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La Cour suprême clarifie le pouvoir de la Cour du Québec d’ordonner des mesures correctrices lorsqu’un enfant est victime d’une lésion de droits.
Par suite du séjour d’une adolescente en centre de réadaptation, cette dernière et ses parents ont déposé devant la Chambre de la jeunesse de la Cour du Québec (« tribunal ») une demande en déclaration de lésion de droits en vertu de l’art. 91 al. 4 de la Loi sur la protection de la jeunesse (« LPJ »). Cet alinéa prévoit que le tribunal peut ordonner qu’une situation lésant les droits d’un enfant en difficulté soit corrigée. Une lésion de droits survient lorsque les droits d’un enfant ne sont pas respectés. Le tribunal a identifié quatre situations ayant lésé les droits de l’adolescente et a recommandé et ordonné une série de mesures correctrices. Quatre d’entre elles ont été contestées par la directrice de la protection de la jeunesse (« DPJ »), qui estimait que ces mesures allaient au-delà des pouvoirs correctifs confiés au tribunal parce qu’elles ne se rapportaient pas directement à la situation de l’adolescente. Les deux premières ordonnances visent des unités de traitement individualisé où l’adolescente a séjourné, et les deux autres, le Centre intégré de santé et de services sociaux A (« CISSS A »). Le tribunal a ordonné que les intervenants, éducateurs et agents d’intervention qui travaillent dans les unités de traitement individualisé puissent recevoir une formation spécifique en santé mentale et que ces unités puissent bénéficier du soutien d’un professionnel de la santé spécialisé en santé mentale. Il a aussi ordonné au CISSS A de mettre en place dans un délai raisonnable un protocole pour déterminer la marche à suivre lorsqu’un enfant crache durant une intervention, et d’adapter toutes les salles d’isolement pour qu’elles soient plus sécuritaires et que leurs murs soient recouverts d’un matériel empêchant les blessures.
La Cour supérieure a accueilli partiellement l’appel de la DPJ, concluant que les quatre ordonnances contestées allaient au-delà des pouvoirs confiés au tribunal par le législateur puisqu’elles visent d’autres enfants que l’adolescente impliquée dans cette affaire. Le juge de la Cour supérieure a modifié les ordonnances du tribunal afin qu’elles visent spécifiquement la situation de l’adolescente. Cette décision a été portée en appel par l’adolescente, par ses parents et par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (« Commission »). Comme le juge de la Cour supérieure, les juges majoritaires de la Cour d’appel ont conclu que les quatre ordonnances contestées étaient générales, allaient au-delà de la situation de l’enfant visée par les procédures et devaient donc être restreintes. La Commission a interjeté appel à la Cour suprême du Canada.
La Cour suprême a accueilli l’appel en partie.
Les mesures correctrices doivent viser à faire cesser les effets de la lésion de droits sur l’enfant qui est devant le tribunal et à y remédier.
Écrivant au nom de la Cour, le juge en chef Wagner a déterminé que le législateur a voulu confier au tribunal les pouvoirs correctifs nécessaires pour assurer la protection la plus complète de l’intérêt et des droits de l’enfant dont le tribunal est saisi de la situation. Selon le juge en chef Wagner, cette protection doit viser à la fois le présent et le futur, et tenir compte autant des circonstances à l’origine de la lésion de droits que de ses conséquences sur l’état psychologique et physique de l’enfant. Le tribunal peut ordonner des mesures correctrices qui visent à faire cesser la situation lésionnaire si celle-ci lèse toujours les droits de l’enfant, à remédier aux conséquences psychologiques ou physiques que vit l’enfant en raison de la lésion de droits, et à éviter que la situation lésionnaire ne se reproduise pour cet enfant. Une mesure correctrice de nature préventive ne peut être ordonnée qu’à condition que l’enfant dont les droits ont été lésés soit à risque de subir à nouveau la situation lésionnaire, que la mesure correctrice soit à même de contribuer efficacement à prévenir la récurrence de la situation lésionnaire, et qu’elle soit en lien avec la protection de l’intérêt et des droits de l’enfant dont le tribunal est saisi de la situation.
La cause en bref est un document rédigé par le personnel des communications de la Cour suprême du Canada afin d’aider le public à mieux comprendre les décisions de la Cour. La cause en bref ne fait pas partie des motifs de jugement de la Cour et ne doit pas être utilisée lors de procédures judiciaires.
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