La cause en bref
R. c. Kahsai
- La décision
- Date : le 28 juillet 2023
- Référence neutre : 2023 CSC 20
- Décompte de la décision :
- En appel de la Cour d’appel de l'Alberta
- Renseignements sur le dossier (40044)
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- Décisions des tribunaux inférieurs (en anglais seulement) :
- Déclarations de culpabilité (Cour du Banc de la Reine de l’Alberta) (non publiées)
- Appel (Cour d’appel de l’Alberta)
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La Cour suprême rejette la demande de nouveau procès d’un homme déclaré coupable de deux meurtres.
Cette affaire porte sur la détermination du rôle approprié de l’amicus curiae dans un procès criminel. Le terme « amicus curiae » (dont le pluriel est « amici ») est une expression latine qui signifie « ami de la cour ». L’amicus est un avocat indépendant à qui un juge demande de participer à une affaire donnée. Il ne représente aucune des parties en cause. Son rôle précis dépend de l’affaire concernée et des besoins qui ont été identifiés par le juge. Lorsque l’accusé n’est pas représenté par un avocat, le juge peut nommer un amicus afin que celui-ci assiste la cour, par exemple pour contester la cause du poursuivant et contre-interroger les témoins. L’objectif est de faire en sorte que le juge ou le jury entende une « perspective contradictoire » – un point de vue différent de celui présenté par le poursuivant – afin d’arriver à un résultat équitable.
Deux amici ont été nommés à des moments différents dans le cadre du procès de M. Emanuel Kahsai, qui a été déclaré coupable par un jury du meurtre de deux femmes à Calgary en 2015. L’accusé n’a pas retenu les services d’un avocat pour le représenter au procès – il a insisté pour se représenter lui-même tout au long de l’instance. Le premier amicus a été nommé avant le procès afin d’aider M. Kahsai lors du processus de sélection des jurés. Au procès, M. Kahsai a fréquemment eu un comportement perturbateur. Il n’a pas interrogé les témoins et n’a présenté aucune défense. Durant le procès, le juge a décidé de nommer un second amicus chargé de contre-interroger les témoins de la Couronne, de façon à assurer le déroulement équitable et approprié des procédures. Il a clairement indiqué que l’amicus n’agirait pas comme avocat de l’accusé, afin de respecter le droit de M. Kahsai de se représenter lui-même. Malgré le mandat limité confié à l’avocat, M. Kahsai s’est opposé à sa nomination et il a, pour l’essentiel, refusé de coopérer avec lui tout au long de l’instance.
À la fin du procès, le juge a interrompu la plaidoirie finale de M. Kahsai parce que ce dernier ne disait rien de pertinent pour sa défense. Le juge n’a pas demandé à l’amicus de prononcer la plaidoirie finale pour le compte de M. Kahsai. Pour sa part, l’amicus n’a pas demandé la permission de le faire, puisqu’il estimait que la portée de son rôle l’empêchait de plaider pour la défense.
Monsieur Kahsai a fait appel de ses déclarations de culpabilité devant la Cour d’appel de l’Alberta. Il a soutenu que le fait que le juge n’avait pas nommé l’amicus plus tôt dans l’instance et ne lui avait pas confié un rôle plus contradictoire créait une apparence d’iniquité qui justifiait la tenue d’un nouveau procès. Deux des trois juges ont rejeté l’appel. Selon eux, confier à l’amicus des fonctions contradictoires aurait porté atteinte au droit de M. Kahsai de se représenter lui-même. Le troisième juge, qui n’était pas du même avis, a affirmé dans ses motifs qu’imposer un avocat à l’accusé lorsqu’il s’agit d’une affaire complexe et que ce dernier est incompétent pour se représenter lui-même ne contrevient pas au droit de l’accusé de contrôler sa propre défense – au contraire, cela a pour effet de préserver son droit à un procès équitable. Monsieur Kahsai a interjeté appel devant la Cour suprême du Canada.
La Cour suprême a rejeté l’appel.
La nomination tardive et le rôle limité de l’amicus ne justifiaient pas d’ordonner un nouveau procès.
Rédigeant la décision unanime de la Cour, la juge Karakatsanis a déclaré que le procès paraissait équitable du point de vue de l’observateur raisonnable, de telle sorte qu’un nouveau procès n’était pas nécessaire. À son avis, bien que l’amicus ne puisse jamais assumer entièrement le rôle qui incombe à l’avocat de l’accusé, il peut s’acquitter de « fonctions similaires à celles d’un avocat de la défense » lorsqu’un point de vue contradictoire est nécessaire pour assurer l’équité du procès.
En l’espèce, la juge Karakatsanis a indiqué que le juge du procès avait le pouvoir discrétionnaire de nommer un amicus chargé d’un mandat plus large, mais qu’il n’avait pas l’obligation de le faire. Elle a reconnu qu’il y avait eu un déséquilibre frappant en raison du fait que M. Kahsai n’était pas représenté par un avocat et qu’il n’avait présenté aucune défense utile. Toutefois, « [i]l n’est pas évident que la nomination d’un amicus plus tôt ou chargé d’un mandat plus large aurait été plus utile pour M. Kahsai, qui a résisté vigoureusement à cette nomination et maintenu son opposition à sa participation tout au long du procès. » À son avis, le juge du procès avait suffisamment traité des préoccupations relatives à l’équité du procès dans les circonstances. Pour ces raisons, la juge Karakatsanis a rejeté l’appel.
La cause en bref est un document rédigé par le personnel des communications de la Cour suprême du Canada afin d’aider le public à mieux comprendre les décisions de la Cour. La cause en bref ne fait pas partie des motifs de jugement de la Cour et ne doit pas être utilisée lors de procédures judiciaires.
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