La cause en bref

Commission scolaire francophone des Territoires du Nord-Ouest c. Territoires du Nord-Ouest (Éducation, Culture et Formation)

La Cour suprême annule des décisions ministérielles refusant l’admission d’enfants de parents non-ayants droit à l’école en français dans les Territoires du Nord-Ouest.   

Cette affaire concernait la question de savoir si le refus d’admettre des enfants de parents non-ayants droit dans des écoles francophones des Territoires du Nord-Ouest a dûment tenu compte des protections conférées par l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés.  

L’article 23 garantit à certaines catégories de citoyens canadiens le droit à l’instruction dans la langue officielle minoritaire. L’objectif de cette disposition est de prévenir l’érosion des communautés linguistiques officielles, ainsi que de remédier aux injustices passées et de favoriser leur épanouissement. Les « ayants droit » sont titulaires de ce droit constitutionnel en vertu de leur langue maternelle ou de leur instruction. Les citoyens canadiens dont un enfant a reçu ou reçoit, au primaire ou au secondaire, son instruction dans la langue officielle minoritaire ont le droit de faire instruire tous leurs enfants dans cette langue. Les « non-ayants droit » sont des gens qui ne satisfont pas aux exigences de l’article 23, et qui ne sont donc pas titulaires de ce droit. En 2016, les Territoires du Nord-Ouest ont adopté une directive ministérielle sur l’inscription aux programmes d’enseignement en français langue première qui prévoyait des catégories de parents non-ayants droit admissibles, dont celles de «francophone non citoyen » et de « nouvel arrivant ».

Dans les Territoires du Nord‑Ouest, deux écoles publiques offrent actuellement un programme d’enseignement en français langue première. En 2018 et 2019, cinq parents non-ayants droit ont demandé à la Ministre de l’Éducation, de la Culture et de la Formation l’admission de leurs enfants dans un programme d’enseignement en français langue première. Dans chaque cas, la Commission scolaire francophone des Territoires du Nord-Ouest a recommandé l’admission parce que celle-ci favoriserait l’épanouissement de la communauté franco-ténoise. Malgré ces recommandations, la Ministre a rejeté chacune des demandes. À son avis, les parents ne satisfaisaient pas aux conditions établies par la directive. Elle a aussi refusé d’exercer son pouvoir discrétionnaire résiduel afin d’admettre les enfants de ces parents.   

Les parents et la Commission se sont adressés à la Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest. Le juge a annulé les décisions de la Ministre et lui a renvoyé les demandes d’admission pour réexamen, principalement parce qu’elles ne reflétaient pas une mise en balance proportionnée des protections conférées par l’article 23 de la Charte. La Ministre a porté le jugement de la Cour suprême en appel devant la Cour d’appel des Territoires du Nord-Ouest, laquelle a rétabli les décisions annulées. Selon les juges majoritaires de la Cour d’appel, la Ministre n’avait pas à considérer l’article 23 en exerçant son pouvoir discrétionnaire puisque les parents n’étaient pas titulaires de droits en vertu de cette disposition. Les parents et la Commission ont interjeté appel à la Cour suprême du Canada.

La Cour suprême du Canada a accueilli l’appel.  

La Ministre devait considérer l’article 23 de la Charte dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire.

Rédigeant les motifs unanimes de la Cour, la juge Côté a statué que les décisions de la Ministre ont des incidences importantes sur les valeurs consacrées par l’article 23 de la Charte, notammentle maintien et l’épanouissement des communautés linguistiques minoritaires. Il en découle que ces valeurs doivent donc toujours être prises en compte, et ce, même en l’absence d’atteinte directe au droit garanti par l’article 23.

La juge Côté a conclu que la Ministre n’avait pas mis en balance de manière proportionnée ces valeurs et les intérêts du gouvernement. En exerçant son pouvoir discrétionnaire, cette dernière avait accordé une trop grande importance à son obligation de prendre des décisions cohérentes et au coût des services envisagés. En raison du caractère réparateur de l’article 23, les besoins pédagogiques devaient peser plus lourd dans la balance. Les décisions de la Ministre étaient donc déraisonnables. Pour ces motifs, la juge Côté a annulé les ordonnances prononcées par la Cour d’appel.

La cause en bref est un document rédigé par le personnel des communications de la Cour suprême du Canada afin d’aider le public à mieux comprendre les décisions de la Cour. La cause en bref ne fait pas partie des motifs de jugement de la Cour et ne doit pas être utilisée lors de procédures judiciaires.