La cause en bref
Murray-Hall c. Québec (Procureur général)
- La décision
- Date : le 14 avril 2023
- Référence neutre : 2023 CSC 10
- Décompte de la décision :
- Unanimité : le juge en chef Wagner a rejeté le pourvoi (avec l’accord des juges Karakatsanis, Côté, Rowe, Martin, Kasirer, Jamal et O’Bonsawin)
- En appel de la Cour d’appel du Québec
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La Cour suprême du Canada décide que l’interdiction de posséder et de cultiver des plantes de cannabis à des fins personnelles au Québec est constitutionnelle.
En 2018, le gouvernement fédéral a adopté une loi portant sur le cannabis. Suivant cette loi, les gens ne peuvent avoir en leur possession ou cultiver plus de quatre plantes de cannabis à domicile. Les provinces et les territoires ont par la suite adopté leurs propres lois afin de réglementer des questions pratiques comme les modalités relatives à la vente et à l’entreposage du cannabis. Au Québec, la Loi encadrant le cannabis interdit aux gens de posséder et de cultiver des plantes de cannabis à des fins personnelles. Les gens qui sont pris en contravention de cette loi peuvent se voir imposer une amende de 250 $ à 750 $.
Peu après, M. Murray-Hall a présenté devant la Cour supérieure du Québec une action en son nom et au nom de toutes les personnes dans la province qui pourraient se voir imposer une amende parce qu’elles possèdent ou font la culture de plantes de cannabis. Il a alors plaidé que le gouvernement du Québec n’avait pas le pouvoir d’interdire les plantes de cannabis. Il a plutôt fait valoir que seul le gouvernement fédéral a un tel pouvoir en matière de droit criminel, qui relève de la compétence fédérale que lui confère le paragraphe 91(27) de la Constitution du Canada. Subsidiairement, M. Murray-Hall a soutenu que l’interdiction au Québec devrait être déclarée inopérante puisque la loi fédérale devrait l’emporter sur la loi provinciale.
La juge lui a donné raison et a déclaré l’interdiction québécoise inconstitutionnelle. Le procureur général du Québec a porté cette décision en appel au nom de la province.
La Cour d’appel du Québec n’était pas de cet avis et a jugé que l’interdiction était constitutionnelle, car elle portait sur des questions qui relèvent de la compétence provinciale en vertu de deux autres dispositions de la Constitution, soit le paragraphe 92(13), qui permet aux provinces d’édicter des lois en matière de propriété et de droits civils, et le paragraphe 92(16), qui leur permet d’édicter des lois de nature locale ou privée dans la province. Ce résultat a fait en sorte que les Québécois et les Québécoises ne peuvent pas posséder ou faire la culture de plantes de cannabis. M. Murray-Hall a porté la décision en appel à la Cour suprême.
La Cour suprême a rejeté le pourvoi.
En poursuivant des objectifs de santé et de sécurité publiques, la législature québécoise avait compétence pour interdire la possession et la culture du cannabis à des fins personnelles.
Rédigeant la décision unanime de la Cour, le juge en chef Wagner a statué que le caractère véritable des dispositions contestées de la loi provinciale était d’assurer l’efficacité du monopole étatique sur le cannabis afin de protéger la santé et la sécurité de la population, particulièrement celles des jeunes, contre les méfaits du cannabis. L’interdiction de posséder des plantes de cannabis et d’en faire leur culture à domicile était un moyen d’atteindre les objectifs de santé et de sécurité publiques de la loi provinciale. Selon le juge en chef, ces interdictions agissent comme incitatifs à l’intégration des consommateurs au marché licite du cannabis qui assure, entre autres, « le contrôle de la qualité des produits offerts, la sensibilisation aux risques posés par la consommation et le respect de normes relatives à l’âge minimal d’achat ». De telles interventions législatives provinciales en matière de santé publique relèvent de la compétence provinciale sur la propriété et les droits civils, ainsi que de la compétence résiduelle en matière de nature purement locale ou privée.
Par ailleurs, le juge en chef a déterminé que les dispositions contestées de la loi provinciale ne posaient pas d’entrave à la réalisation de l’objectif de la loi fédérale. Contrairement à la prétention de M. Murray-Hall selon laquelle l’objectif de la loi fédérale était de conférer un droit positif de posséder ou de cultiver un maximum de quatre plantes de cannabis dans le but d’éliminer ou de limiter le marché illicite du cannabis, le juge en chef a précisé que l’objectif de la loi fédérale était plutôt de limiter la présence des organisations criminelles dans le marché du cannabis, tout en excluant la possession et la culture d’un maximum de quatre plantes de cannabis du champ d’application des infractions criminelles de la loi fédérale. Bien que la loi provinciale interdise toute possession ou culture de plantes de cannabis, le même objectif a guidé les deux ordres de gouvernement.
Pour ces motifs, le juge en chef a conclu que les dispositions de la loi provinciale interdisant au Québec la possession et la culture des plantes de cannabis étaient valides et opérantes selon la Constitution canadienne.
La cause en bref est un document rédigé par le personnel des communications de la Cour suprême du Canada afin d’aider le public à mieux comprendre les décisions de la Cour. La cause en bref ne fait pas partie des motifs de jugement de la Cour et ne doit pas être utilisée lors de procédures judiciaires.
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