La cause en bref

R. c. C.P.

  • La décision
  • Date : le 7 mai 2021
  • Référence neutre : 2021 CSC 19
  • Décompte de la décision :
    • Majorité : Sur la question du caractère raisonnable du verdict, la juge Rosalie Silberman Abella a estimé qu’il n’y avait aucune raison de conclure que le verdict était déraisonnable. (avec l’accord du juge en chef Wagner et des juges Moldaver, Karakatsanis, Brown, Rowe, Martin et Kasirer)
    • Dissidence : Sur la question du caractère raisonnable du verdict, la juge Suzanne Côté a conclu que le verdict était déraisonnable, parce que la conclusion de la juge du procès selon laquelle R.D. était intoxiquée à un point tel qu’elle ne pouvait pas avoir donné son consentement avait été tirée de manière illogique et que la preuve ne permettait pas d’appuyer cette conclusion. | Sur la question de la constitutionnalité du par. 37(10) de la LSJPA, le juge en chef Wagner a déclaré qu’il n’y avait eu aucune violation des art. 7 ou 15 de la Charte (avec l’accord des juges Moldaver, Brown et Rowe) | Le juge Nicholas Kasirer a estimé qu’il n’y avait pas violation de l’article 7. Il a toutefois conclu qu’il y avait violation de l’article 15, mais que cette violation était justifiée suivant l’article premier | La juge Rosalie Silberman Abella a conclu qu’il y avait violation de l’article 15 (avec l’accord des juges Karakatsanis et Martin) | La juge Suzanne Côté n’a pas estimé nécessaire de se prononcer sur la constitutionnalité du par. 37(10) parce que la question était devenue théorique après l’octroi par la Cour d’une autorisation d’appel.
  • En appel de la Cour d’appel de l'Ontario
  • Renseignements sur le dossier (38546)
  • Diffusion Web de l'audience
  • Décisions des tribunaux inférieurs (en anglais seulement) :

Il est constitutionnel de refuser aux jeunes contrevenants un droit d’appel automatique à la Cour suprême. La Cour suprême confirme la condamnation d’un adolescent déclaré coupable d’agression sexuelle parce que la victime, une adolescente, était trop ivre pour consentir à l’activité sexuelle.   

Le jugement rendu aujourd’hui découle d’une fête qui s’est déroulée sur une plage de la région de Toronto et au cours de laquelle un garçon de 15 ans a agressé sexuellement une jeune fille de 14 ans. Après avoir été reconnu coupable d’agression sexuelle, le garçon, désigné par les initiales C.P. parce qu’il est un jeune contrevenant, a interjeté appel à la Cour d’appel de l’Ontario. Il prétendait que le verdict était déraisonnable compte tenu de la preuve. L’appel de C.P. a été rejeté, mais l’un des trois juges a exprimé son désaccord avec ses collègues sur un point de droit.

Les adultes qui sont déclarés coupables de crimes graves de ce genre en vertu du Code criminel et dont l’appel est rejeté disposent d’un droit d’appel automatique au plus haut tribunal du Canada lorsqu’il y a désaccord entre les juges de la Cour d’appel sur une question de droit. Mais ce n’est pas le cas pour les contrevenants reconnus coupables de tels crimes en vertu de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents (LSJPA). Dans son appel, C.P. a contesté le paragraphe 37(10) de la LSJPA, affirmant que cette disposition viole les droits garantis aux adolescents par la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte).

L’argument constitutionnel

Dans son appel, C.P. a demandé à la Cour suprême d’infirmer le verdict de culpabilité et de décider si le paragraphe 37(10) de la LSJPA viole les droits qui lui sont garantis par les articles 7 et 15 de la Charte. L’article 7 protège le droit d’une personne à la vie, à la liberté et à la sécurité. L’article 15 de la Charte protège les groupes contre la discrimination, notamment la discrimination fondée sur l’âge. La Cour a accepté de répondre à ces deux questions.

Le verdict était raisonnable  

Une majorité de juges de la Cour suprême a conclu, tout comme les juges majoritaires de la Cour d’appel, que le verdict était raisonnable. Selon eux, la juge du procès a fourni de solides motifs pour appuyer sa conclusion quant à ce qui s’est passé selon elle la nuit de l’agression sexuelle. Ils ont affirmé que les motifs sur la base desquels la juge du procès a déclaré C.P. coupable étaient rigoureux et soigneusement expliqués.  

Le paragraphe 37(10) de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents est constitutionnel

Les juges majoritaires de la Cour suprême ont également conclu que le paragraphe 37(10) de la LSJPA est constitutionnel. Cinq juges ont expliqué que la LSJPA ne viole pas les droits garantis à C.P. par l’article 7 de la Charte, car le système de justice moderne pour les adolescents reconnaît la vulnérabilité des jeunes contrevenants en leur offrant des mesures de protection supplémentaires et mieux adaptées, qui correspondent à leur situation particulière.

Quatre juges ont estimé que le paragraphe 37(10) ne viole pas les droits garantis à C.P. par l’article 15. Ils ont dit que le Parlement n’a pas fait preuve de discrimination envers les adolescents quand il a adopté la LSJPA. Selon ces juges, la loi établit un équilibre entre les avantages d’un mécanisme d’appel à l’encontre d’une décision et les préjudices nécessairement liés à un tel processus, par exemple le principe voulant que l’issue finale des procédures criminelles ne soit pas retardée inutilement.

Un juge a conclu que le paragraphe 37(10) violait les droits garantis à C.P. par l’article 15, mais que cette violation était raisonnable suivant l’article premier de la Charte, qui précise que les droits en question peuvent être restreints, si la limite est raisonnable et justifiée dans le cadre d’une société libre et démocratique. Ce juge a affirmé que, dans le cas de C.P., la limite en question était justifiée, parce qu’elle favorise la réalisation de l’objectif qui consiste à rendre justice en temps opportun et parce que les adolescents peuvent toujours interjeter appel à la Cour suprême en demandant la permission de le faire.

La cause en bref est un document rédigé par le personnel des communications de la Cour suprême du Canada afin d’aider le public à mieux comprendre les décisions de la Cour. La cause en bref ne fait pas partie des motifs de jugement de la Cour et ne doit pas être utilisée lors de procédures judiciaires.