La cause en bref

PF Résolu Canada inc. c. Hydro Québec

Hydro-Québec pouvait obliger une compagnie papetière à payer des redevances gouvernementales en vertu d’un contrat qui avait été conclu avec une autre entreprise d’électricité puis transféré à Hydro-Québec, juge la Cour suprême.

En 1926, la Canadian International Paper Company, une papetière, a conclu avec la Compagnie d’électricité Gatineau (Électricité Gatineau) un contrat dans lequel elle s’engageait à payer à cette dernière l’électricité qu’elle lui fournissait pour exploiter ses usines.

Le contrat prévoyait que la papetière pourrait être obligée de payer toute « taxe ou redevance » que versait l’entreprise d’hydroélectricité au gouvernement québécois. Le contrat précisait également qu’il s’appliquerait aux « successeurs ou ayants droit » des deux entreprises, ce qui signifiait que quiconque succéderait à la papetière devrait respecter ce contrat.

Hydro-Québec a été créée par le gouvernement québécois dans les années 1940. Le gouvernement voulait nationaliser l’électricité (c’est‑à‑dire faire de l’électricité un bien public). Dans les années 1960, Hydro-Québec a acheté la plupart des actions d’Électricité Gatineau. Hydro-Québec fournissait de l’électricité à la papetière, qui la payait pour ce service, ainsi que le prévoyait le contrat de 1926. En 1982, la papetière a conclu avec Hydro‑Québec un contrat en vue d’obtenir davantage d’énergie. Ce contrat mentionnait le contrat conclu avec Électricité Gatineau en 1926. Les factures d’électricité de la papetière sont émises par Hydro‑Québec depuis au moins 1999.

En 2007, le gouvernement du Québec a commencé à exiger d’Hydro-Québec deux paiements annuels. En 2011, Hydro-Québec a envoyé à la papetière une facture de 3 millions $ à l’égard de ces sommes.

Hydro-Québec a dit que le contrat de 1926 lui permettait de le faire. Selon elle, Électricité Gatineau lui « a cédé » (transféré) le contrat en 1965. La papetière a répondu que le contrat de 1965 avait fait d’Hydro‑Québec la « mandataire » d’Électricité Gatineau, c’est-à-dire qu’Hydro-Québec agissait pour le compte d’Électricité Gatineau, et non pour son propre compte. Elle a ajouté que son contrat était avec Électricité Gatineau, qu’elle ne devait rien à Hydro-Québec et que, même si ce n’était pas le cas, la cession du contrat n’était pas autorisée. Elle a également affirmé que les sommes en question n’étaient pas des « taxes ou redevances ». (Toutes les parties étaient d’accord pour dire que la papetière qui avait signé le contrat en 1926 est par la suite devenue PF Résolu.)

La juge de première instance a conclu qu’Électricité Gatineau n’avait pas cédé le contrat de 1926 à Hydro-Québec. Elle a expliqué que le contrat de 1965 avait constitué Hydro-Québec « mandataire » d’Électricité Gatineau. Elle a ajouté que les sommes dues n’étaient pas des « taxes ou redevances ». Cela voulait dire que PF Résolu n’était pas obligée de les payer. La Cour d’appel a pour sa part jugé que le contrat de 1926 avait été cédé par l’effet du contrat de 1965 et que les sommes en question étaient des « taxes ou redevances ».

Les juges majoritaires de la Cour suprême ont dit être du même avis que la Cour d’appel, mais pour des raisons différentes. Ils ont conclu que la juge de première instance avait commis des erreurs importantes en affirmant que le contrat de 1965 était un « mandat » (c’est-à-dire qu’il faisait d’Hydro-Québec une « mandataire » agissant pour le compte d’Électricité Gatineau). La Cour d’appel pouvait donc intervenir.

Les juges majoritaires ont déclaré qu’en 1965, Électricité Gatineau avait cédé à Hydro‑Québec le contrat conclu avec la papetière. Si Hydro-Québec agissait pour le compte d'Électricité Gatineau, comme le prétendait PF Résolu, elle ne pourrait alors conserver les profits pour elle-même et elle ne serait pas non plus responsable d’acquitter les obligations dues à PF Résolu.

Les juges de la majorité ont affirmé qu’une partie à un contrat doit obtenir le consentement de l’autre partie pour céder le contrat à quelqu’un d’autre. Dans la présente affaire, Électricité Gatineau avait obtenu à l’avance ce consentement. En effet, le contrat de 1926 prévoyait qu’elle pouvait procéder à une telle cession. La papetière (qui est plus tard devenue PF Résolu) savait aussi, au moins depuis 1982, qu’Électricité Gatineau faisait affaire avec Hydro‑Québec.

Les juges majoritaires ont conclu qu’il n’était pas important que les sommes facturées par le gouvernement soient considérées comme des « taxes » ou non, puisque le contrat de 1926 indiquait que la papetière devrait payer les augmentations de « taxes ou redevances ». De plus, le fait qu’Hydro‑Québec appartient au gouvernement n’était pas non plus important, car les provinces sont autorisées à imposer des taxes ou des redevances aux sociétés d’État (aux entreprises qui leur appartiennent). Hydro-Québec pouvait demander à PF Résolu de payer ces taxes ou redevances, étant donné que le contrat de 1926 lui avait été cédé et que ce contrat prévoyait qu’elle pouvait le faire.

Le Code civil du Québec s’applique à la plupart des questions juridiques autres que criminelles au Québec. Le problème que soulevait la présente affaire découlait en partie de l’absence de règles explicites concernant la cession de contrat dans le Code civil. La Cour s’est penchée auparavant sur un contrat ayant fait l’objet d’une cession dans l’affaire Modern Concept d’entretien inc. c. Comité paritaire.

La cause en bref est un document rédigé par le personnel des communications de la Cour suprême du Canada afin d’aider le public à mieux comprendre les décisions de la Cour. La cause en bref ne fait pas partie des motifs de jugement de la Cour et ne doit pas être utilisée lors de procédures judiciaires.