La cause en bref
Desjardins Cabinet de services financiers inc. c. Asselin
- La décision
- Date : le 30 octobre 2020
- Référence neutre : 2020 CSC 30
- Décompte de la décision :
- Majorité : le juge Nicholas Kasirer a accueilli l’appel en partie (avec l’accord du juge en chef Wagner et des juges Abella, Karakatsanis, Brown et Martin)
- Dissidence : la juge Suzanne Côté a conclu que les cours d’appel auraient dû respecter la décision de la juge saisie de la demande d’autorisation de ne pas autoriser le recours collectif contre Desjardins Cabinet de Services financiers, mais qu’il pouvait aller de l’avant contre Desjardins Gestion internationale d’actifs (seulement pour les dommages compensatoires et non pour les dommages punitifs) (avec l’accord des juges Moldaver et Rowe)
- En appel de la Cour d’appel du Québec
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Un recours collectif intenté par des investisseurs contre des vendeurs et des gestionnaires de fonds communs de placement peut aller de l’avant, a statué la Cour suprême.
Desjardins Cabinet de Services financiers a vendu des fonds communs de placement et a aussi aidé des gens avec leur planification financière. Desjardins Gestion internationale d’actifs a créé et géré des placements que les gens pouvaient acheter.
M. Asselin a consulté une planificatrice financière de Desjardins. Celle-ci lui a recommandé d’acheter certains placements, ce qu’il a fait. Les placements étaient « à capital garanti », ce qui veut dire qu’il ne perdrait pas d’argent. La représentante a donné à M. Asselin des documents indiquant que les placements seraient rentables et qu’ils n’étaient pas risqués. En fin de compte, il n’a pas gagné d’argent. Il a toutefois récupéré son placement initial.
M. Asselin a dit qu’il n’a découvert que plus tard que les placements étaient risqués. Selon lui, ils étaient gérés d’une façon risquée. M. Asselin a affirmé qu’il ne les aurait pas achetés s’il avait été au courant des risques. Il a soutenu que Desjardins Cabinet de Services financiers aurait dû aviser ses planificateurs financiers du risque, de sorte qu’ils puissent en aviser leurs clients. D’autres gens ont aussi affirmé qu’ils étaient dans la même position que lui. M. Asselin a décidé d’intenter un « recours collectif » en leur nom. Il a affirmé que Desjardins Cabinet de Services financiers était directement responsable du fait qu’il n’avait pas obtenu le rendement escompté, parce que Desjardins Cabinet de Services financiers n’a pas donné les directives appropriées à ses planificateurs financiers et à ses autres représentants. Il a dit que Desjardins Cabinet de Services financiers était indirectement responsable du fait que les représentants ont transmis des renseignements erronés. M. Asselin a aussi affirmé que Desjardins Gestion internationale d’actifs était responsable parce qu’elle a créé et géré les placements.
Lorsque de nombreuses personnes sont aux prises avec un même problème juridique, elles peuvent décider de se mettre ensemble et d’intenter une action en groupe. C’est ce qu’on appelle un « recours collectif ». (En d’autres mots, c’est un recours en groupe.) Un tel recours permet à l’ensemble du groupe de faire juger sa plainte en même temps. Autrement, chaque personne devrait intenter elle-même sa propre action en justice. Un juge doit accorder une permission pour que le recours collectif aille de l’avant (c.-à-d. qu’il doit l’autoriser). Au Québec, le principal objectif du juge est de s’assurer que le recours collectif n’est pas « frivole » (n’a aucune possibilité de succès).
La juge saisie de la demande d’autorisation a dit que le recours collectif ne pouvait être autorisé. La Cour d’appel a affirmé qu’il pouvait aller de l’avant.
Les juges majoritaires de la Cour suprême étaient en grande partie du même avis que la Cour d’appel. Ils ont conclu que la juge saisie de la demande d’autorisation était allée au-delà de s’assurer que le recours collectif n’était pas frivole, ce qui était légalement erroné à cette étape du processus.
Les juges majoritaires n’ont pas pris de décision concernant l’action de M. Asselin. Ils ont seulement dit qu’il pouvait se faire entendre en cour.
Les juges majoritaires étaient d’accord avec M. Asselin pour dire que Desjardins Cabinet de Services financiers avait une « obligation d’informer » les gens au sujet des risques. Les juges majoritaires ont conclu qu’un juge de première instance pourrait ultimement le déclarer directement responsable (pour ne pas avoir donné les renseignements à ses représentants) et indirectement (par ses représentants agissant en son nom). Toutefois, un juge de première instance déciderait ultérieurement de cette question.
Les juges majoritaires ont affirmé qu’un juge de première instance pourrait tenir Desjardins Gestion internationale d’actifs responsable de la façon dont elle a conçu et géré les placements. Par contre, elle ne serait peut-être pas responsable de tout. Une partie du recours collectif, soit la demande pour des « dommages-intérêts punitifs » (qui ne visent pas à indemniser les victimes, mais à punir les auteurs d’une faute) n’irait pas de l’avant. Le juge de première instance devrait décider ce que cela visait.
Les recours collectifs reposent sur le fait que les gens ont les mêmes problèmes juridiques. Cela signifie que le tribunal doit trancher des « questions communes » (des questions qui sont les mêmes pour bon nombre des membres du groupe ou la totalité de ceux-ci). Cependant, les membres peuvent aussi avoir des questions et problèmes individuels. Au Québec, il suffit qu’il y ait une seule question commune pour que le recours collectif aille de l’avant. Dans ce cas, une question commune était que Desjardins Cabinet de Services financiers n’avait pas correctement informé ses représentants, qui ont ensuite omis d’aviser leurs clients des risques. Il ne s’agissait pas d’un conseiller financier en particulier qui avait commis une erreur. Il est possible que tous les conseillers financiers aient fait la même erreur s’ils n’ont pas reçu de formation appropriée ou s’ils n’ont pas reçu les bons renseignements.
Les recours collectifs visent à aider les gens à avoir accès à la justice. Cela peut être plus facile à faire en groupe qu’individuellement. Lorsqu’un recours collectif est autorisé, les juges ne sont pas censés se demander si les demandeurs obtiendront gain de cause; ils doivent seulement se demander si l’affaire a des possibilités de succès. Les provinces et territoires ont différentes règles, mais les objectifs sont les mêmes. La Cour s’est déjà prononcée sur des recours collectifs dans les arrêts suivants : Société des loteries de l’Atlantique c. Babstock, Pioneer Corp. c. Godfrey, L’Oratoire Saint Joseph du Mont Royal c. J.J. et TELUS Communications Inc. c. Wellman.
La cause en bref est un document rédigé par le personnel des communications de la Cour suprême du Canada afin d’aider le public à mieux comprendre les décisions de la Cour. La cause en bref ne fait pas partie des motifs de jugement de la Cour et ne doit pas être utilisée lors de procédures judiciaires.
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