La cause en bref
Modern Concept d’entretien inc. c. Comité paritaire
- La décision
- Date : le 3 mai 2019
- Référence neutre : 2019 CSC 28
- Décompte de la décision :
- Majorité : la juge Rosalie Silberman Abella a rejeté l’appel (avec l’accord du juge en chef Wagner et des juges Moldaver, Karakatsanis, Gascon et Martin)
- Dissidence : les juge Suzanne Côté, Russell Brown et Malcom Rowe ont affirmé que le juge de première instance pouvait conclure que M. Bourque était un entrepreneur indépendant parce qu’il avait l’intention d’accepter un risque d’entreprise, et ils auraient accueilli l’appel
- En appel de la Cour d’appel du Québec
- Renseignement sur le dossier (37813)
- Diffusion Web de l'audience
- Décisions des tribunaux inférieurs :
- Ordonnance (Comité paritaire de l’entretien d’édifices publics de la région de Québec, non disponible en ligne)
- Jugement (Cour du Québec)
- Appel (Cour d’appel du Québec)
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C’est la nature véritable de la relation — et non le libellé d’un contrat — qui détermine si quelqu’un est un salarié, a jugé la Cour suprême.
Modern Concept d’entretien offrait des services d’entretien ménager. Elle signait des contrats avec des clients et gérait l’entreprise, mais elle engageait des individus (qu’elle appelait « franchisés ») pour effectuer le travail d’entretien proprement dit. Les clients étaient facturés par Modern Concept d’entretien et non par ceux qui effectuaient l’entretien.
M. Bourque était propriétaire de sa propre entreprise d’entretien ménager, qu’il exploitait à temps partiel dans la région de Québec avec l’aide de sa femme. En 2014, il est devenu un franchisé de Modern Concept d’entretien. Le contrat stipulait que M. Bourque était un entrepreneur indépendant et qu’il contrôlait totalement son entreprise. Cependant, il prévoyait aussi que Modern Concept d’entretien exerçait d’importants contrôles sur M. Bourque. Ce dernier devait signaler immédiatement toute plainte et renvoyer un employé si l’entreprise ou un client le lui demandait. Il devait signaler toute occasion qui se présentait de conclure de nouveaux contrats d’entretien ménager. Modern Concept d’entretien payait M. Bourque directement, après déduction des sommes qu’il lui devait en vertu du contrat. Celles-ci pouvaient s’élever jusqu’à 43 % de ses revenus.
Après cinq mois, M. Bourque a quitté parce qu’il était incapable de développer son entreprise et de réaliser des profits. Il a mis fin au contrat et a recommencé à exploiter sa propre entreprise.
Dans la région de Québec, les salariés qui effectuent l’entretien des édifices publics sont régis par une convention collective, appelée le Décret sur le personnel d’entretien d’édifices publics de la région de Québec. Le terme « salarié » est défini dans la Loi sur les décrets de convention collective. Il ne vise pas les entrepreneurs indépendants. Le Comité paritaire de l’entretien d’édifices publics de la région de Québec (le Comité) veille au respect du Décret.
Le Comité s’est penché sur la situation de M. Bourque. Selon les termes du contrat que M. Bourque avait conclu avec Modern Concept d’entretien, il était un entrepreneur indépendant. Le Comité était toutefois d’avis que M. Bourque était en réalité un salarié, ce qui signifiait que l’entreprise devait à celui‑ci et à sa femme plus de 9 000 $ pour les salaires impayés et d’autres avantages. Il a porté la cause devant les tribunaux en leur nom.
Le juge de première instance a conclu que M. Bourque était un entrepreneur indépendant, mais la Cour d’appel à la majorité a estimé qu’il était un salarié. Cette dernière a affirmé que le juge de première instance aurait dû prendre davantage en compte le modèle de gestion de l’entreprise, et que la façon dont les trois différentes parties (Modern Concept d’entretien, ses clients et M. Bourque) étaient liées ensemble était importante pour juger cette affaire.
Les juges majoritaires de la Cour suprême ont souscrit à la décision de la Cour d’appel. Ils ont affirmé que la détermination du statut d’entrepreneur indépendant ou de salarié dépendait en réalité des faits propres à chaque cas. Les entrepreneurs indépendants fonctionnent plus à la manière d’une entreprise. Contrairement aux salariés, ils assument les risques liés à l’entreprise dans le but de faire des profits. Après avoir examiné les contrats conclus respectivement avec le client et M. Bourque, il est apparu évident que Modern Concept d’entretien assumait le risque et avait la possibilité de faire des profits. Elle était responsable envers ses clients de veiller à l’exécution du travail. Elle était dédommagée pour le risque qu’elle prenait en pouvant toucher jusqu’à 43 % des revenus de M. Bourque. Les conditions du contrat faisaient en sorte qu’elle contrôlait étroitement ce dernier. Étant donné ces restrictions, M. Bourque n’était pas vraiment en mesure de développer son entreprise ni de faire de profit. Cela revenait à dire qu’il était un salarié.
Dans cette affaire, on a jugé qu’une personne était un salarié en vertu d’une loi précise (la Loi sur les décrets de convention collective). Une personne peut être considérée comme un salarié en vertu d’une loi (par exemple la Loi), mais non en vertu d’une autre (par exemple une loi sur l’assurance‑emploi). Chaque situation doit être évaluée en fonction des faits qui lui sont propres.
Le personnel des communications de la Cour suprême du Canada rédige des causes en bref pour aider le public à mieux comprendre les décisions de la Cour; les causes en bref ne font pas partie des motifs de jugement de la Cour et elles ne doivent pas être utilisées lors d’une procédure judiciaire.
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