La cause en bref
Pioneer Corp. c. Godfrey
- La décision
- Date : le 20 septembre 2019
- Référence neutre : 2019 CSC 42
- Décompte de la décision :
- Majorité : Le juge Russell Brown a rejeté les appels (avec l’accord du juge en chef Wagner et des juges Abella, Moldaver, Karakatsanis, Gascon, Rowe et Martin)
- Dissidence partielle : La juge Suzanne Côté a dit, entre autres choses, que les gens qui avaient acheté d’autres compagnies ne devraient pas participer au recours collectif et que, pour ce motif et d’autres raisons — notamment le caractère commun des questions soulevées dans des recours collectifs — elle aurait accueilli les appels en partie.
- En appel de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique
- Renseignement sur le dossier (37809) (37810)
- Diffusion Web de l'audience
- Décisions des tribunaux inférieurs (en anglais seulement) :
- Explorez la Cour
Quand des compagnies fixent les prix, même les gens qui ont acheté d’autres compagnies peuvent les poursuivre, a tranché la Cour suprême.
Les « lecteurs de disques optiques » comprennent les CD, DVD et lecteurs Blu-ray. Pioneer, Toshiba et d’autres compagnies les ont fabriqués et vendus. Elles ont aussi fabriqué des produits qui en contiennent.
M. Godfrey a dit que ces compagnies s’étaient entendues pour vendre ces lecteurs et produits à des prix plus élevés. C’est ce que l’on appelle la « fixation des prix », une pratique illégale selon la Loi sur la concurrence fédérale. M. Godfrey a mentionné qu’entre 2004 et 2010, les consommateurs ont payé des prix plus élevés à cause de cette pratique. D’après lui, le véritable prix du marché aurait été moindre.
M. Godfrey a intenté un « recours collectif » en Colombie-Britannique. Un recours collectif est un type particulier de poursuite : un groupe de personnes aux prises avec le même genre de problème se rassemblent pour engager une poursuite. Dans le terme « recours collectif », l’adjectif « collectif » désigne le groupe tandis que le nom « recours » désigne la poursuite. Les recours collectifs peuvent toucher un grand nombre de personnes et leurs droits juridiques. Des gens peuvent être touchés même s’ils ne participent pas activement à la poursuite. Un juge doit donner son autorisation pour qu’un recours collectif aille de l’avant. Le « représentant des demandeurs » agit pour le compte du groupe. M. Godfrey était le représentant des demandeurs dans la présente affaire.
M. Godfrey a dit que le « groupe » devrait se composer de toute personne se trouvant en Colombie-Britannique qui a acheté des lecteurs de Pioneer ou de Toshiba. Il a ajouté que le groupe devrait comprendre les personnes qui ont acheté des lecteurs fabriqués et vendus par d’autres compagnies. Toujours selon M. Godfrey, ces compagnies ont imposé des prix plus élevés parce que Pioneer et Toshiba l’avaient fait.
Selon la Loi sur la concurrence fédérale, une poursuite comme celle de M. Godfrey devait être intentée dans un délai de deux ans. Pioneer a affirmé que le recours exercé contre elle l’a été trop tard. Il en était ainsi parce que la période visée par la poursuite de M. Godfrey a pris fin en 2010 et que le recours collectif contre Pioneer a été intenté en 2013. Pioneer et Toshiba ont ajouté qu’elles n’étaient pas responsables des actes d’autres compagnies. Toujours selon elles, les gens qui ont acheté des produits fabriqués et vendus par d’autres compagnies ne pouvaient pas faire partie du groupe.
Le juge saisi de la demande d’autorisation a donné à M. Godfrey la permission d’aller de l’avant avec le recours collectif. La Cour d’appel lui a donné raison.
Les juges majoritaires de la Cour suprême du Canada a dit elle aussi que le recours collectif pouvait aller de l’avant. D’après eux, les consommateurs qui ont acheté d’autres compagnies que Pioneer et Toshiba pouvaient faire partie du groupe. Il en est ainsi parce que M. Godfrey entendait démontrer que les actes de Pioneer et de Toshiba ont eu des répercussions sur l’ensemble du marché. Comme les prix de Pioneer et de Toshiba étaient plus élevés, d’autres compagnies ont emboîté le pas. Des gens ont été lésés parce qu’ils ont payé un prix plus élevé que celui qu’ils auraient dû payer. Pioneer et Toshiba ont donc enregistré des profits plus élevés. Pour obtenir quelque indemnité que ce soit, par contre, les gens qui ont acheté d’autres compagnies devraient démontrer précisément qu’elles ont subi un préjudice.
Les juges majoritaires ont ajouté qu’il était possible de prolonger le délai de deux ans pour intenter une poursuite si la personne ne pouvait pas vraiment avoir connaissance du problème plus tôt. Ils n’ont pas réellement décidé s’il était trop tard pour que M. Godfrey poursuive Pioneer. Ils ont dit qu’il incomberait au juge du procès de trancher cette question plus tard. Ils ont mentionné que les délais de ce genre ont trois objectifs. Le premier est de procurer la certitude aux gens, pour qu’ils ne soient pas pris de court par des poursuites visant des gestes qu’ils ont posés il y a longtemps. Le deuxième est de veiller à ce que la preuve soit encore disponible et puisse encore servir. Le troisième est d’encourager les gens à agir rapidement quand ils sont lésés. Dans la présente affaire, M. Godfrey a dit que Pioneer et Toshiba avaient dissimulé leurs agissements pour que lui et les autres consommateurs ne puissent les découvrir. Selon les juges majoritaires, il serait illogique que des gens puissent perdre le droit de poursuite avant même de pouvoir apprendre, d’une façon ou d’une autre, qu’ils ont été lésés.
Les juges majoritaires ont ajouté que M. Godfrey et le groupe pouvaient poursuivre Pioneer et Toshiba pour deux motifs juridiques. Premièrement, ils pouvaient intenter une poursuite fondée sur la Loi sur la concurrence, car, selon les juges majoritaires, la fixation des prix était illégale. Deuxièmement, M. Godfrey et le groupe pouvaient intenter une poursuite fondée sur les règles de common law (le droit jurisprudentiel, établi par les juges). Des règles différentes s’appliquent à chacune d’elles et l’une n’exclut pas l’autre.
Dans cet arrêt, la Cour n’a pas décidé si Pioneer et Toshiba avaient fait quelque chose de mal. Elle a seulement décidé que le recours collectif pouvait aller de l’avant et que les deux parties pouvaient plaider leur cause. La Cour suprême du Canada s’est récemment penchée sur des recours collectifs dans TELUS Communications Inc. c. Wellman et L’Oratoire Saint Joseph du Mont Royal c. J.J.
La cause en bref est un document rédigé par le personnel des communications de la Cour suprême du Canada afin d’aider le public à mieux comprendre les décisions de la Cour. La cause en bref ne fait pas partie des motifs de jugement de la Cour et ne doit pas être utilisée lors de procédures judiciaires.
Explorez la Cour: Les juges de la Cour | Le rôle de la Cour | Visitez la Cour
- Date de modification :