La cause en bref

Bessette c. Colombie-Britannique (Procureur général)

Une personne accusée d’une infraction provinciale en C.-B. a droit à un procès en anglais ou en français (comme pour un procès au criminel), a statué la Cour suprême.

Le gouvernement fédéral a le pouvoir de faire des lois sur les crimes. La principale loi en la matière est le Code criminel, qui porte, entre autres, sur des actes comme le meurtre. Le Code criminel prévoit aussi des règles sur la façon dont les procès au criminel doivent être tenus.

Les provinces et les territoires ont aussi le pouvoir de faire des lois concernant les « quasi-crimes » (un quasi-crime est semblable à un crime, mais moins grave). C’est le cas des infractions provinciales (ou territoriales), qui concernent des actes comme le fait de ne pas porter la ceinture de sécurité. En C.-B., il y a une loi, la Offence Act,qui explique les règles concernant la façon dont les procès provinciaux sur des infractions doivent être tenus.

M. Bessette a été accusé d’une infraction provinciale en C.-B. Il a demandé à ce que son procès se déroule en français.

S’il avait été accusé d’un crime en vertu du Code criminel, M. Bessette aurait eu droit à un procès en anglais ou bien en français. Ce droit n’a pas seulement pour but d’assurer un procès équitable. Il vise le respect de l’identité linguistique et culturelle de l’accusé. Toutes les cours du Canada qui traitent des affaires criminelles tiennent déjà des procès dans les deux langues officielles. C’est aussi le cas de la Cour provinciale de la C.-B., où avait lieu le procès de M. Bessette.

Comme l’infraction provinciale commise par M. Bessette n’était pas un crime, le Code criminel ne s’appliquait pas – du moins pas directement. Mais la Offence Act de la C.-B. était muette quant à la langue des procès. Par contre, elle disait que le Code criminelpouvait être utilisé pour combler les vides dans la Offence Act. Selon M. Bessette, cela voulait dire que les parties du Code criminel qui traitaient de la langue s’appliquaient et qu’il devrait pouvoir choisir de subir son procès en français ou en anglais.

La Couronne (la poursuite) n’était pas de cet avis. Selon elle, les procès pour infractions provinciales devaient se dérouler en anglais, parce que c’est ce que disait une loi anglaise du 18e siècle. Cette loi faisait partie des lois de la C.-B. parce que cette province avait adopté toutes les lois anglaises en matière criminelle qui existaient quand elle était une colonie britannique. Le juge de la cour provinciale était d’accord avec la Couronne. M. Bessette a voulu contester cette décision, mais les cours supérieures de la C.-B. n’ont pas examiné ses arguments. Elles ont dit qu’il devrait attendre et les présenter en appel s’il était déclaré coupable.

En règle générale, dans une affaire criminelle ou quasi-criminelle, on ne peut pas arrêter un procès en plein milieu pour traiter de questions secondaires, parce qu’il est important que justice soit rendue rapidement. M. Bessette a fait valoir que les droits linguistiques étaient trop importants pour n’être qu’une question secondaire. Selon lui, les cours supérieures de la C.-B. auraient dû annuler la décision de la Cour provinciale de tenir le procès en anglais.

La Cour suprême du Canada a conclu à l’unanimité que M. Bessette avait droit à un procès en français. À son avis, le juge de la Cour suprême de la C.-B. a eu tort de conclure que M. Bessette devrait attendre et faire appel s’il était déclaré coupable. Elle a examiné la façon dont la Offence Act, le Code criminel et la loi anglaise du 18e siècle fonctionnaient ensemble. Elle a déclaré que lorsqu’une personne est accusée d’une infraction provinciale, c’est la Offence Act qui s’applique d’abord, sauf si une autre loi plus précise a priorité. Dans ce cas, la loi plus précise (la Motor Vehicle Act)était muette sur la question de la langue du procès. Cela signifiait que la Offence Act s’appliquait toujours – sauf qu’elle ne traitait pas de cette question non plus. Elle mentionnait cependant que le Code criminel pouvait être utilisé pour combler les vides. Selon le Code criminel, M. Bessette avait droit à un procès dans l’une ou l’autre langue. La Cour a statué que cette disposition l’emportait sur celle de la loi anglaise du 18e siècle.

Puisque la loi prévoyait que M. Bessette avait le choix, la Cour provinciale n’avait pas le pouvoir de lui imposer un procès en anglais. Toute décision au terme du procès aurait été sans effet juridique, car les droits linguistiques de l’accusé quant à son procès n’auraient pas été respectés. S’il avait perdu son procès (en anglais), il aurait pu porter en appel la question de la langue du procès. Mais une fois que la cour d’appel aurait conclu qu’une erreur avait été faite, il aurait probablement dû subir un deuxième procès (en français). S’il avait gagné son procès (en anglais), il n’aurait jamais eu la chance de faire respecter ses droits linguistiques, parce qu’on ne peut pas faire appel d’une décision quand on a gagné.

Cette cause ne portait pas sur les droits linguistiques de M. Bessette au regard de la Charte canadienne des droits et libertés. Elle portait sur ce que prévoyaient toutes les lois applicables à son procès, prises ensemble, au sujet de la langue dans laquelle il avait le droit d’être jugé. La Cour suprême du Canada a déjà traité des droits linguistiques lors des audiences dans la cause Mazraani c. Industrielle Alliance, Assurance et Services financiers inc.

Le personnel des communications de la Cour suprême du Canada rédige des causes en bref pour aider le public à mieux comprendre les décisions de la Cour; les causes en bref ne font pas partie des motifs de jugement de la Cour et elles ne doivent pas être utilisées lors d’une procédure judiciaire.